Psychologie

Le rapport de la “génération contrôlante” à l’infertilité

EXPERT
@ Marion de La Forest Divonne
(Spécialiste en développement personnel)

@Agathe Mayer
Rédactrice

La génération « contrôlante », nourrie à l’immédiateté a appris, à vivre avec un rapport au temps très différent de celui de  ses anciens. Elle vit de façon instantanée, en ayant réponse à tout très vite grâce au numérique. Pour ces femmes et ces hommes, l’attente n’est pas acquise ; l’attente est un ennemi qui s’interpose irrémédiablement devant le désir d’enfant. Cette génération a grandi  avec l’illusion du contrôle des naissances grâce à la contraception et l’IVG (interruption volontaire de grossesse). Or avoir un bébé ne fonctionne pas comme cela. 

Marion de La Forest Divonne, autrice de « Les âmes fécondes » décrypte les attentes et les déconvenues de cette génération, ainsi que son trouble devant l’infertilité.

AVOIR UN ENFANT, UN PROJET PAS COMME LES AUTRES

Elles sont nombreuses ses futures mères investies par leur désir d’enfant à avoir rêvé et planifié la naissance de leur petit comme elles auraient organisé leur voyage de noce. Convaincues que parce que notre société aujourd’hui permet de contrôler les naissances grâce à la contraception et l’IVG, que leur désir d’enfant serait satisfait aussi vite et aussi parfaitement que ce qu’elles avaient imaginé.

De la découverte du test de grossesse positif, à l’annonce faite à la famille et aux amis en passant par le mois de naissance choisi en fonction de la météo, des vacances, le désir d’enfant devient un projet dont elles semblent maîtriser tous les tenants et les aboutissants. La grossesse devient un plan que l’on peut cadrer comme les études, les voyages, les déménagements ou même l’organisation millimétrée de la vie quotidienne.  “Cette idée de contrôle absolu sur la planification d’avoir un enfant se trouve renforcée par un certain nombre d’objets connectés proposant des services et des applications « capables » de « traquer  les jours d’ovulation, prédire le sexe du bébé » « nous permettant de jouer au néo-assistantes-gynéco et de monitorer nos cycles”, explique Marion de la Forest Divonne.

 

Si bien équipées, si certaines d’avoir le pouvoir de créer la vie, les femmes vivent chaque nouveau mois sans signe de grossesse une forme de deuil. « A la douleur physique des règles s’ajoute la douleur intérieure de ne pas réussir à donner la vie », affirme l’autrice. « On se relève avec plus ou moins de facilité, on fonde tous ses espoirs  sur le cycle suivant… et on retombe », développe Marion de la Forest Divonne.

 

Au fil des échecs, se met en place un processus pervers où le désir d’enfant prend toute la place. Il devient obsessionnel  et devient le maître de tout. Comme le décrit Déborah Schouhmann-Antonio, coach en périnatalité « On devient de plus en plus dans l’obsession d’enfant.[…]je vais vivre entre parenthèse et mon désir d’enfant va prendre le pas, pour ne même pas dire va être le centre de tout ce dont j’ai envie dans ma vie.[…] Et cela me renvoie à une blessure ».

Dans ce difficile parcours, les femmes et les hommes « contrôlants » cherchent  une réponse inconsciente dans la quête toujours et encore de tout maîtriser et de tout comprendre. Et veulent « mettre toutes les chances de leur côté pour que ça fonctionne ».

 

LE CONTRÔLE UNE ARME INCONSCIENTE DE DESTRUCTION MASSIVE

Cette génération, bercée dans l’illusion du contrôle des naissances, vit dans l’instantanéité, a oublié d’être patiente et possède une faible résistance à la frustration.  Le contrôle reste un mécanisme de protection qui donne l’impression d’agir au lieu de subir. Il permet de se donner l’illusion d’avoir la main, de garantir par l’effort la réussite et d’être convaincu que « si on veut, on peut ». Or avoir un enfant ne rentre dans aucune de ces cases ni de ces mécanismes. Et comme le rappelle le psychologue David Richo, « nous gaspillons beaucoup d’énergie à essayer de maîtriser ce qui ne peut pas être ».

 

COMMENT MIEUX VIVRE LA SITUATION

Pour toutes ces femmes et ces hommes qui vivent à 100% dans le contrôle,  il est difficile de recommander de lâcher prise. En effet, cette attitude reste la plus effrayante pour ces control-freak.

Une des premières étapes pour mieux accepter la situation et trouver la voie vers le lâcher-prise est d’admettre qu’il existe, selon David Richo, 5 choses qu’on ne peut pas changer dans la vie.

  • l’imprévu : les événements ne se déroulent pas toujours selon notre planification.
  • le manque d’amour : votre entourage n’est pas toujours aimant ni loyal.
  • la souffrance : au cœur de la vie, elle existe et sera toujours présente toute au long de votre histoire.
  • l’injustice : indéniablement la vie est injuste.
  • l’impermanence : les sentiments évoluent et changent, rien dans la vie n’est ancré dans le marbre et tout meurt.

Marion de la Forest Divonne, prisonnière de sa nature de contrôlante, a trouvé dans le schéma d’Igor Thiriez, une voie pour avancer tout en s’autorisant un minimum essentiel de contrôle. « C’est un cercle. A l’intérieur de ce cercle, il est écrit que je peux contrôler. A l’extérieur, je ne peux pas contrôler. Ce schéma là m’autorise à garder un minimum de contrôle. Et c’est beaucoup plus acceptable pour moi », explique l’auteure.

 

A vous de positionner à l’intérieur ce que vous pouvez contrôler et laisser le reste à l’extérieur.

 

Souvent, ce schéma révèle que les natures contrôlantes luttent en vain sur un certain nombre d’éléments et placent au mauvais endroit leur énergie.

Marion de la Forest Divonne rappelle « qu’il est peut-être essentiel de placer en dehors du cercle les autres, la vie des autres, pour réduire à néant notre fâcheuse tendance à nous comparer au « bonheur » des autres ».

 

Un pas pour continuer à vivre votre réalité, celle où vous n’êtes pas enceinte et continuer à l’apprécier. Il est nécessaire de se recentrer sur ce qui existe, votre couple, vos amis, votre famille, votre boulot et tout ce que vous pouvez justement faire car vous n’avez pas d’enfant.

 

Même si ce travail n’est pas si évident, il vous permettra d’appréhender au mieux votre situation  et comme le rappelle Marion de la Forest Divonne en citant Lewis H. Morgan, anthropologue, « L’art de vivre consiste en un subtil mélange entre lâcher prise et tenir bon ».

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