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Vaccination : Comment les femmes envisagent la 3eme dose ?

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Angéline Galinier-Warrain
Rédactrice

Difficile de passer à côté en ce moment, la vaccination est au cœur de toutes les conversations.

Des enfants aux adultes. Ces derniers mois, les témoignages de femmes ayant déclaré des troubles du cycle menstruel après avoir reçu une dose de vaccin anti-Covid se sont multipliés. Combien de temps ces troubles menstruels durent-ils ? Peuvent-ils affecter la fertilité ? Faut-il recevoir ou non sa dose de rappel ? Retour sur une enquête du journal 20 Minutes qui a tenté de comprendre comment les femmes envisagent cette 3eme dose.

Vaccination : Comment les femmes envisagent la 3eme dose ?

Des cycles chaotiques. Des règles qui reviennent bien trop vite ou beaucoup plus tard qu’espéré, ou qui sont plus douloureuses, plus longues ou abondantes. Voilà comment les femmes décrivent leur quotidien. Même si les premiers retours des études scientifiques sont rassurants, de nombreuses femmes ayant déjà ressenti ces troubles ou les craignant, se posent des questions. En effet, l’ouverture de la campagne pour la 3eme dose de rappel, sans laquelle le pass sanitaire ne sera plus valide après le 15 janvier, est source de questionnements et d’inquiétude.

Des témoignages sans appel 

Claire a toujours eu « des règles très régulières : le même jour, à l’heure près. Mais après avoir reçu la deuxième dose, j’ai eu deux semaines de retard. Cela fait cinq mois qu’elles arrivent au hasard, c’est très embêtant ». Idem pour Gwladys, « alors que je n’avais jamais eu de soucis en dix ans. Là, mes règles arrivent une semaine sur deux ou toutes les deux semaines ». Après chacune de ses deux doses, Carole, elle, a eu des perturbations différentes « Après la première, j’ai eu un retard de 50 jours ! Et à la deuxième, j’ai été réglée deux fois le même mois. Depuis, mes règles sont irrégulières et douloureuses ». Quant à Valentine, « la première injection a déclenché des règles sans fin, tous les jours pendant trois mois, et beaucoup plus douloureuses », assure la jeune femme, qui a « peur que cela se reproduise lors de la troisième dose ». Dans un premier temps, Sasha ne s’est pas inquiétée. « J’ai toujours eu des cycles plus ou moins irréguliers, confie la jeune femme, qui souffre d’endométriose. Mais après la première dose comme la deuxième, mon cycle a été beaucoup plus douloureux, long et abondant, et avec un syndrome prémenstruel de quinze jours ! Il a fallu cinq cycles pour que les choses se stabilisent ».

La piste d’un mécanisme inflammatoire

L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), avait auparavant étudié ces phénomènes en considérant que ces cas étaient des « signaux potentiels » liés aux vaccins. A ce jour, aucun lien de causalité n’a clairement été établi. Le Dr Odile Bagot, gynécologue, précise que « ces témoignages ont un intérêt certain, mais il est très difficile de déterminer pour chaque femme la cause de ces perturbations, d’autant que les cycles spontanés (hors pilule) peuvent être influencés par beaucoup de facteurs environnementaux tels que le vaccin anti-Covid, mais aussi le stress, que peut causer le vaccin, ou encore la fatigue ».

Ceci étant certaines hypothèses sont à retenir et le Pr Olivier Picone, gynécologue obstétricien à l’hôpital Louis-Mourier de Colombes, et membre du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) explique que « le vaccin induit une réaction immunitaire et inflammatoire qui pourrait perturber le cycle menstruel. Or, l’arrivée des règles est un mécanisme inflammatoire pour évacuer l’endomètre, donc la possibilité que le vaccin influe sur le cycle est probable. On l’avait déjà observé avec le vaccin HPV contre le » papillomavirus ».

Selon des chercheurs américains, « la réponse immunitaire après la vaccination pourrait amener des cellules immunitaires dans l’endomètre (au niveau de l’utérus) », de nature à entraîner ces irrégularités. Et le Dr Bagot rassure en décrivant que « les troubles décrits ne durent généralement qu’un cycle ».

« Une troisième dose qui ne fait pas l’unanimité »

Ces troubles font donc hésiter les jeunes femmes qui malgré les convictions de certaines sur l’utilité des vaccins commencent à douter. Les douleurs et la gêne occasionnée par les règles les poussent souvent à faire machine arrière et si le pass sanitaire peut convaincre certaines femmes pour d’autres ça n’est pas l’argument phare. Enfin, d’autres ont vu leurs troubles partir avec le temps et recommande la patience.

 

« La fertilité toujours en cause »

Se faire vacciner est également une décision compliquée pour celles qui désirent un enfant en témoigne ces femmes :

« Je suis en projet bébé depuis huit mois », explique Chloé, qui a eu un retard de règles après sa deuxième dose. « Alors je songe à retarder la troisième au maximum ».

Esther partage les mêmes craintes. La jeune femme a depuis son vaccin « des règles irrégulières, ce qui rend l’ovulation difficile à cibler. Le vaccin, je préfère encore attendre d’être enceinte pour le refaire ».

La vaccination n’a pas de mauvais effets sur la fertilité assure l’ensemble des écritures scientifiques. Nous avons des dizaines de patientes qui ont démarré une grossesse après avoir été vaccinées, rassure le Pr Picone qui conseille « mieux vaut ne pas attendre ». Il ajoute avoir vu « trop de patientes enceintes en réanimation », et conseille de recevoir sa dose de rappel pour se protéger soi et son enfant à naître, surtout dans ce contexte de forte reprise épidémique ».

Ces femmes qui sont toutes dans des parcours plus ou moins simples, aimeraient avoir des réponses claires car « tout ça ajoute de l’angoisse au parcours de PMA », regrette Laureen. Quant à Delphine elle précise « même si je compte me faire revacciner, j’aimerais que la recherche s’y intéresse pour être sereine ».

« Il faut écouter les témoignages » et « s’il y a un lien, savoir comment cela se produit »

Des travaux sont en cours face à la prolifération des témoignages et le Pr Picone insiste « Il faut les écouter et faire la lumière ». Mais les choses bougent, les autorités sanitaires américaines ont sélectionné cinq centres de recherche, pour mener une étude observationnelle. « S’il y a un lien entre les vaccins et les changements menstruels, nous devons savoir comment cela se produit, a expliqué le Pr Mostafa Borahay, professeur agrégé de gynécologie et d’obstétrique à l’Ecole de Médecine de l’Université Johns Hopkins, un des 5 prestigieux centre. Nous prévoyons donc d’examiner au niveau biologique la réponse de l’endomètre à la vaccination anti-Covid ».

« Cette recherche nous aidera à mieux comprendre s’il existe un lien réel (avec) les vaccins ou s’il s’agit d’autre chose, comme des changements de mode de vie ou le stress lié à la pandémie » a renchéri le chercheur. En tout état de cause, souligne le Pr Picone, « ce dont il faut avoir peur, c’est du virus, pas du vaccin ».

 

Source : 20 Minutes 
Photo : ©ozgurcankaya/IStock